Les nouvelles amazones sont arrivées !

Publié le par Radu Stoenescu

A califourchon sur leurs étalons de hasard, les femmes-filles, Eve Nouvelles autant qu'harpies, procréent - pour leur consommation personnelle - leurs rejetons pokemon au nom du droit à disposer de son propre corps. Orgasmant solitaires devant leur miroir, désarçonnant le mâle, abolissant le couple, néantisant l'amour.

Virgin genocide ou lebensborn amazone ?


C'est une blague soviétique actualisée. Deux amis discutent : « Crois-tu, demande l'un, que ça y est, que nous avons brisé tous les tabous, que nous avons enfin atteint la libération totale ? »


« Penses-tu, non, répond l'autre, ça peut encore empirer ! ».


Voilà une « nouvelle insolite », qui aurait réjoui la plume du regretté Philippe Muray : « Dix-huit lycéennes américaines d'un même établissement de Gloucester (Massachusetts, nord-est des Etats-Unis) toutes mineures, sont sur le point d'accoucher au même moment, et plusieurs d'entre elles avaient décidé collectivement d'être enceintes. » Les experts se penchent, perplexes, sur ce pacte étrange, et le maire de Gloucester a bien sûr mis en place « un comité de réflexion » pour les « conseiller sur les réactions appropriées et sur les mesures à adopter au niveau du lycée et de sa crèche ».

 

On se demande bien quelle peut être la teneur de ces conseils, sur « ces réactions appropriées » pour lesquelles on convoque des experts, on se doute déjà qu'il s'agit de ne pas « stigmatiser » ces adolescentes qui ont toutes moins de seize ans, de les aider à continuer leurs études, de mettre en place des cabines spéciales pour qu'elles puissent changer les couches de leurs marmots entre deux QCM, de chiffrer les coûts et de lever les yeux vers le ciel. J'espère que parmi ces futures mamans, il y aura quelques fanatiques de l'allaitement maternel, qui déboutonneront leur corsage juvénile en plein cours de mathématiques pour nourrir leur avorton, et causer ainsi un imbroglio judiciaire total : le prof qui apercevra le malheureux sein qu'il ne saurait voir sera-t-il passible de visionnage de réalité pédophile ? La jeune mère causera-t-elle une atteinte publique à la morale ? Pourra-t-on l'exclure du cours sans porter atteinte à son droit d'étudier ? Que de réjouissances pénales en perspective...

 

Les sociologues sont perplexes devant cette « épidémie de grossesses » qui s'est abattue soudainement, sans crier gare, sur la pauvre bourgade de Gloucester, qui pourtant est à « plus de 90% blanche » comme neige, comme Blanche-Neige, c'est-à-dire a priori frigide et chaste, non corrompue par la lubricité « noire » des Sept Nains, et attendant pour l'éternité le Prince charmant au baiser stérilisé, pour la réveiller du sommeil mortel de l'ennui sécurisé. Etait-elle déjà trop « noire » cette Gloucester, est-ce là ce que voulait nous dire cette statistique ethnique ? Les moins de 10% de noirceur avérée la rendaient-ils plus vulnérable à cette épidémie ? Non, les fins limiers des causes sociologiques ne sont pas racistes, ils penchent plutôt pour des influences purement magiques : ce sont les films Juno ou encore Knocked Up qui sont à l'origine de ces cloques ! Avatars post-historiques de l'archange Gabriel, porteurs d'une semence médiatique, d'une contagion mimétique, c'est par les yeux que ces films fécondèrent cette bande de vierges Maries. C'est au fond de leurs pupilles avides, labourées par les sitcoms, lavées par les soap-opéras, violées par les films d'horreur, que les foetus nidifièrent, avant de descendre vers leurs bas-ventres, simples annexes de leurs yeux-utérus. Les « petites poupées » que l'iris de chacun reflète, appelées à devenir poupées vivantes, par l'intermédiaire magique des yeux-corps de ces adolescentes. Quoi de plus logique que d'imposer un jour le tchador comme moyen de contraception à ces possibles victimes d'une fécondation in video ?

 

Ce n'est que justice si le Dr. Brian Orr et son infirmière, Kim Daly, officiant à la clinique du lycée de Gloucester, ont été déboutés de leur demande de « prescrire des anticonceptionnels aux adolescentes sans l'autorisation des parents ». Ils ont un train de retard sur les nouvelles causes magiques des grossesses. Leur demande est grotesque et illogique : pourquoi exiger l'accès libre aux anticonceptionnels pour ces adolescentes, alors qu'elles voulaient tomber enceintes, et qu'elles passaient régulièrement au cabinet pour se faire tester, et manifestaient leur mécontentement si leur Annonciation était lente à venir ? Autant exiger l'autorisation de vendre des patchs de nicotine pour contrer la volonté de fumer, la suppression des happy hour dans les bars pour diminuer les comas éthyliques, et la méditation sur la marche des escargots pour éradiquer l'attrait pour la vitesse qui tue sur les routes.

 

Les pseudo réponses magiques à l'épidémie de poupons de Gloucester sont aussi symptomatiques du nouveau monde débarrassé des mâles que cette épidémie d'amazonisme elle-même. Le nouveau monde radieux des enfants-mères est, comme la rose d'Eckhart, un monde sans pourquoi. Personne ne se scandalise de la volonté de ces néo-amazones de tomber enceintes, de leur attitude parfaitement utilitariste envers le sexe opposé, traité en simple banque de sperme portable, gratuite et anonyme. Pas si anonyme que cela, d'ailleurs, car on pourrait toujours retrouver les pères, « qui ne sont pas identifiés pour l'instant », dit la dépêche, mais qui « seraient tous âgés de plus de 21 ans et risquent d'être poursuivis pour "détournement de mineures", selon la législation généralement très libérale de l'Etat du Massachusetts. »

 

Je me demande à quoi fantasmaient ces adolescentes perverses avec le membre d'un inconnu dans leur con, de quoi jouissaient-elles le plus : était-ce de leur sordide acte sexuel réel, ou bien de la possibilité de poursuivre cet acte par une chasse pénale du « pédophile » qu'elles venaient d'engendrer elles-mêmes, et dont leur môme allait être la preuve indiscutable, comme la robe tâchée de sperme présidentiel de Monica Lewinsky ? Qu'est-ce qui les excitaient le plus, cette bande d'obsédées par le « détournement de majeurs » en série, le pénis, ou bien le pénal ? Leurs actes sexuels n'étaient au fond que des préliminaires bâclés de l'acte pénal réellement jouissif, qui tend au seul orgasme qu'émeut les mantes religieuses : la condamnation du « pédophile ». Le pacte des amazones de Gloucester, comme celui des antiques amazones, avait en fait pour objet la criminalisation des hommes en tant qu'hommes. La production du mâle en tant que criminel, son expulsion à l'endroit même de son utilisation égoïste et narcissique : dans l'acte par lequel on l'utilise, on le criminalise, et on lui extirpe la preuve irréfutable de son crime : sa semence. Une concaténation de l'envie du pénis et de l'envie du pénal, et avec en plus la perspective mirobolante de passer pour victimes de la pédophilie des adultes. Qu'un tel cocktail n'excite pas plus de jeunes filles, voilà le véritable mystère du pacte des dévergondées de Gloucester!

 

Les « adultes » eux-mêmes ne s'indignent pas de la perversité de ces enfants. Leur seul problème, c'est que le sperme utilisé pour l'insémination in video n'a pas été traité médicalement : un des donneurs pas si anonymes, un des pédophiles en sursis, serait un « sans-abri de vingt-quatre ans », confie atterré le Principal du lycée. C'est la seule complainte que pousse ce néo-adulte, son seul souci, c'est l'hygiène des donneurs. On ne doute pas qu'ils seront poursuivis pour ce don de sperme illicite, clandestin et sale. (M. le Principal n'est décidément pas au fait des moeurs des amazones. Il ne sait pas que, selon la légende, elles préfèrent les exclus, les estropiés, car leurs infirmités les empêchent d'être violents et d'abuser de leur pouvoir, et en font, selon le témoignage d'Antianeira, une de leurs reines mythiques, « les meilleurs amants ».) Pour le reste, aucun souci : « Nous sommes fiers d'aider ces mères à rester à l'école », raconte la responsable de la crèche lycéenne. Personne ne se demande à quoi sert encore cette école où l'on est si fier de garder ces mères, quand on est incapable de leur enseigner une quelconque morale.

 

Car le secret de Polichinelle de cette affaire de polichinelle dans le tiroir, c'est qu'il n'y a plus ni adultes ni enfants. Est-ce que les inséminateurs de fortune qui, entre deux tombereaux à ordures, déposèrent l'objet du délit dans le ventre avide de ces jeunes filles, étaient des adultes ? Etaient-ils plus évolués, plus responsables, plus matures que les amazones qui les chevauchaient ? L'infantilisation de tous a progressé à un tel point qu'il est désormais caduc de parler encore de majeurs détournant des mineures de quinze ans. Pourquoi à vingt-et-un ans serait-on à présent plus adulte qu'à quinze, quand le discours dominant nous somme de « rester enfant », de « sauvegarder notre part d'innocence », c'est-à-dire de perversité ?

 

Si les inséminateurs sauvages de Gloucester sont poursuivis pour exercice illégal de leur masculinité, pour faiblesse avérée devant les « pervers polymorphes », ce ne sera que le moyen pour un système agonisant de se prouver à lui-même que des adultes existent encore quelque part dans l'univers, un peu comme l'Union Soviétique n'arrêtait pas de dénicher des « ennemis du peuple », même et surtout après avoir totalement triomphé d'eux. On poursuivra ces pédophiles, pour montrer que la distinction entre enfants et adultes est encore réelle, malgré les évidences contraires. L'infantocratie mondiale traquera sans relâche tous les coupables de « détournement de mineurs » de la terre, alors même que rien ne prouve plus qu'ils puissent encore exister, car plus personne ne souhaite depuis longtemps sortir de la minorité. Mais sans cette traque infinie, sa propre vérité en tant qu'infantocratie achevée risque d'apparaître au grand jour ; pour paraphraser quelqu'un : le devenir-monde du polichinelle est aussi un devenir-polichinelle du monde.

 

En fait, c'est l'une des copines des amazones du Massachusetts, elle-même adolescente-mère de dix-neuf ans, qui joua sans le vouloir le rôle de désir-d'enfant-modèle pour ses cadettes, dans le maelström mimétique du lycée de Gloucester. Elle explique en une phrase simple où nous en sommes arrivés aujourd'hui en termes de féminisation et d'infantilisation : « Elles sont tellement excitées à l'idée d'avoir quelqu'un qui les aime sans condition. » Les termes de cette phrase banale sont aussi lourds de significations, que les mamelles des nouvelles nourrices sont gonflées de lait. C'est une conception inédite de l'excitation, de l'amour, de l'autre et de la condition, qui s'exprime dans le pacte des amazones de Gloucester. Une conception qui signifie la mort du masculin. Car le masculin, c'était la loi du père, l'impératif moral, la castration, le refoulement, c'était la condition posée avant l'amour. Je t'aimerai si tu respectes ma loi, si tu ne tues pas, si tu ne déposes pas de faux témoignage, si tu ne convoites pas, etc., dit le père. Je ne t'aime pas inconditionnellement, je peux te renier, je peux te bannir si tu ne respectes pas ma loi. Je te demande de t'élever. Exactement ce que ne supportent plus ces adolescentes de Gloucester. Elles veulent « avoir quelqu'un qui les aime sans condition ». Elles ne l'ont pas ? Qu'à cela ne tienne, elles vont s'en fabriquer un, un petit polichinelle qui les aimera sans condition. Un « néo », un innocent, une poupée animée, un tamagotchi grand format. Cela trahit aussi une conception totalement vide de l'amour : quel amour peut prodiguer un nouveau-né ? Quels égards peut avoir pour une personne un bout de chair informe, sans langage, sans force, et sans liberté ? Que recevront-elles, ces adolescentes en mal d'amour, de l'être qui, précisément, ne les « aimera » qu'à condition d'être allaité et soigné constamment ? Le néo-amour est arrivé : c'est la demande de papouilles gazouillantes qui fait sous elles.

 

On peut se demander donc quelle « excitation » extraordinaire dilate les pupilles de ces adolescentes hébétées. Quel degré d'abstraction ont-elles dû atteindre pour mouiller leur culotte à l'idée d'endurer le châtiment biblique d'Eve ? Elles s'apprêtent à souffrir le martyr pour mettre au monde un petit animal égoïste et dépendant, qui ne sera capable d'un sentiment véritable et désintéressé que bien plus tard, si jamais il devient un adulte (ce qui ne semble de toute façon plus possible, ni même souhaité, dans les nouvelles conditions de vie). Elles attendent le Prince charmant, et accoucheront d'un crapaud. Elles se préparent à des noces mystiques et incestueuses. Quelqu'un les aimera sans condition, qu'elles auront forgé elles-mêmes. Il y a un prométhéisme de pacotille dans ce renversement de la réalité.

 

Mais il ne résume pas à lui seul l'excitation de ces futures nouvelles mères. Ce qui les fait frémir de plaisir, c'est l'anticipation de la scissiparité de leur ego, de leur moi vide et boursouflé, qui veut être « aimé sans condition ». La conscience infantile, absolutisée et creuse, dépourvue de toute condition, de tout interdit, glousse ici de l'idée de pouvoir se dupliquer, sans passer par la douleur de l'âge adulte. Elle s'aime sans condition, la perverse polymorphe, et sa grossesse n'est que l'effet de cet amour propre, de cette vanité gonflée à un tel degré qu'elle accouche d'elle-même. La bêtise touche ici au paroxysme : ces vierges marries de leurs propres géniteurs, croient que leurs bâtards feront mieux qu'elles, et que par enchantement, leur progéniture les aimera mieux qu'elles n'aiment leurs parents.

 

Dans une sorte de frémissement parodique, les adolescentes du Massachusetts pourraient reprendre à leur compte ces mots de Nietzsche à Sils Maria, comme credo pour leur mini secte amazonienne :

 

« J'étais assis là dans l'attente - dans l'attente de rien,

 

Par delà le bien et le mal, tantôt de lumière,
Tantôt d'ombre jouissant, rien que jeu,
Que mer ou midi ou temps sans but - Alors, amie, soudain l'un devint deux. »


Elles sont tout à fait « par delà le bien et le mal », coïtant et criminalisant dans le même mouvement, « dans l'attente de rien », des ombres jouissant de leur vacuité « sans but », et qui deviendront soudain « deux ».

 

Le pathétique et le ridicule de cette situation, c'est que ce qui féconde ces spectres puérils, ce qui les excite n'est autre chose que l'aversion de l'autre sexe, du masculin en tant que porteur d'interdits. L'Annonciation de Gloucester, à l'inverse de l'Annonciation de Nazareth, est le fruit d'une détestation mystique, fidèle et fanatique. Le même engendre le même par haine de l'autre, en croyant engendrer un autre amoureux ! Des êtres incomplets, égoïstes et dépendants mettront au monde des êtres faits à leur image et à leur ressemblance, tout en pensant mettre bas des héros altruistes et généreux. Comble du risible, d'autant plus terrible pour les mâles broyés dans ce processus d'auto engendrement égotiste, dans ce clonage sauvage.

 

Comble du délire aussi : malgré les avertissements de l'adolescente-mère, Cassandre malheureuse, qui leur a dit que « lorsqu'un bébé crie à 3H du matin pour être nourri, c'est dur de se sentir aimée », elles n'en ont pas démordu. Le culte de l'enfant, de l'informe « innocent » était trop vissé à leur propre innocence battant la campagne. En bonnes rivales mimétiques, en parfaites victimes de la « médiation interne » de René Girard, elles n'allaient quand même pas croire leur mère-modèle, leur inspiratrice, car celle-ci voulait sans doute les empêcher d'atteindre à leur tour ce statut envié d'être aimé sans condition. Elle voulait leur dissimuler jalousement les joies secrètes du changement des couches, la méchante, mais les suivantes ne se sont pas fait avoir, elles avaient la foi, et ont tenu bon sur leur route initiatique vers la vérité ineffable de la layette et de la bavette. Elles ont résisté courageusement à la tentation de la réalité, et franchi aisément cet obstacle semé par leur modèle.

 

Un seuil a été franchi dans ce lycée américain : l'accouchement, qui pour toutes les femmes de jadis symbolisait la douleur la plus élevée, et même un risque de mort assez important, en est venu à signifier une joie à nulle autre pareille. Aucun doute qu'au réveil, ces rêveuses chercheront à se venger de la réalité sur ceux qui l'auront accidentellement produite malgré eux : les malheureux pères séduits puis abandonnés après extorsion de liquide séminal. Car je doute fort que ces filles assument leur délire, même si leur volonté consciente d'être engrossées était patente dans ce « midi » où « soudain l'un devint deux. »

 

Le journaliste qui rapporte la nouvelle conclut en disant : « Un employé de McDonald's a déclaré à l'AFP sous couvert d'anonymat que cette nouvelle avait été "un choc pour la communauté". "C'est une honte, mais ces enfants ne sont pas surveillés par leurs parents", a-t-il ajouté. » Il serait intéressant de se demander pourquoi un employé du McDonald's doit faire une déclaration « sous couvert d'anonymat ». Que risque-t-il donc s'il ose proférer de tels propos insultants à l'égard des parents, catégorie stigmatisée de la population ? Un boycott ? Un licenciement ? Viendraient-ils brûler le McDonald's pour atteinte à leur honneur de parents ? C'est vrai qu'on ne peut pas prévoir les réactions des ces parents « stigmatisés ». On n'est jamais trop prudent de nos jours quand on rappelle à quelqu'un ses responsabilités archaïques. Lorsqu'on lui dit soudain, qu'il devrait se comporter en adulte. On ne parle pas d'adultes dans la grande maison des enfants, dans cette grande crèche à ciel ouvert qu'est devenu le monde, et dont les responsables sont si fiers. « Pas de gros mots, s'il vous plaît ! Une cuillère pour maman, une cuillère pour maman... »

 

Radu Stoenescu
Pour le Ring
Article dans sa publication originale




Dans la presse sur ce sujet :

Le Figaro

Le Soir (Belgique)

Elle

Liberation

24 Heures

Rue89

Publié dans Actualité

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